dimanche 17 avril 2016

Ma vélosophie

Ma Vélosophie !

Il y a, dans les voyages à vélo, une philosophie intacte et inaltérable.

Il y a ces souvenirs d’enfance, ces élans d’audace et d’innocence, ce jeu d’équilibre toujours renouvelé et cette révélation : la stabilité se trouve dans le mouvement. Il y a ce sillon que l’on laisse derrière soi et cette étrange façon d’avancer, pour laisser sa trace. Il y a ce bruit âcre des pneus qui mordent la piste. Il y a cette mélodie caoutchoutée que joue sous nos roues les montagnes, les déserts, les continents. Cette musique d’un chemin qui crisse sous les dents des pignons. Il y a cet appétit de graviers que l’on grignote, de kilomètres que l’on avale, de dénivelés dont on ne fait qu’une bouchée. Il y a cette faim d’exploration, si longue à épancher.Il y a dans cette aventure, une façon de faire corps avec la terre, de respirer la poussière, de s’abandonner tout entier au pays que l’on traverse. Il y a dans le voyage à vélo, cette façon de dérouler lentement la planète sous le fil de nos roues, sans urgence, sans impatience. L’unité de temps devient la journée passée sur le vélo. Il y a ce rythme doux qui nous manquait.Il y a ce réveil aux premières lueurs du jour, ce repos quand vient la nuit. Il y a ces matins auxquels on goûte, sur le seuil de la tente, avec de l’impatience et parfois un peu d’angoisse ; matins de montagnes, matins de déserts, matins pleins de promesses où il n’y a rien, mais où l’on a la sensation d’avoir tout.Il y a cette brèche osée dans nos vies structurée, organisées, efficaces. Cette entaille rebelle où s’infiltrent l’imprévu, l’intuition, l’étonnement, la surprise et cette envie d’avancer vers l’inconnu.Il y a cette allure que l’on prend comme on progresse, nez au vent, armé d’un beau panache et d’une courageuse désinvolture. Il y a la découverte de nos ressources sûres, qui ne puisent pas ou peu dans notre force physique, mais dans notre humour, notre simplicité, notre optimisme. Il y a enfin, dans le voyage à vélo, l’humble aveu d’un pas vers l’autre. Avec ses efforts pour sésame, le voyageur rencontre l’homme. Hors de sa bulle, sans vitre ni écran entre lui et le décor, il voit, parle, goûte, touche et respire, saisit le privilège de créer la surprise, attrape et distribue des sourires sur son passage. Et lorsque qu’il pose un pied à terre, c’est pour prendre le temps de connaître son hôte. …